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Coronavirus : l’électronique touchée en plein cœur

L’électronique grand public avait-elle vraiment besoin de cela ? Après une année 2019 marquée par la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, le secteur espérait pouvoir respirer un peu en 2020, avec l’Euro de football et les Jeux olympiques de Tokyo. Bref, de quoi regonfler un marché qui n’a crû que de + 0,7 % en 2019. Patatras, le coronavirus est arrivé. Prouvant à quel point l’électronique, capable de façonner nos vies, est bien fragile. Faut-il y voir aussi le déclin de l’Empire chinois ? « Le pays concentre 70 % de la production mondiale de smartphones et 55 % de la production des écrans dans le monde », chiffre Jérôme Habauzit, le cofondateur du cabinet de recherche en technologie Aqoa. « En dépit des perfectionnements électroniques, il advient parfois que la bonne vieille feuille imprimée soit le moyen d’information le plus pratique », expliquait l’écrivain Arthur C Clarke, dans 2001 l’Odyssée de l’espace. Sans aller jusque-là, voici une étendue des dégâts.

  • Sharp réfléchit à délocaliser « dans un futur très proche »

Premier problème, la reprise du travail après le Nouvel An chinois, le 25 janvier, qui devait avoir lieu le 31 janvier, ne cesse d’être reportée. Et cela touche en premier lieu Foxconn, la plus grosse entreprise du monde avec plus d’un million de salariés. Son siège est à Shenzhen, mais elle possède des ramifications dans tout le pays, comme à Chengdu et à Wuhan.

Foxconn, qui travaille pour des entreprises aussi différentes que Sony, Motorola, Apple, LG, mais également HTC, Acer, ou encore Microsoft, a expliqué qu’elle allait recourir à la quarantaine pour un grand nombre d’employés. On note de même un arrêt de travail dans une usine chinoise de Tesla, qui fabrique en Chine des Model 3 pour le marché local. De son côté, Kasumi Nomura, vice-président de Sharp, a annoncé que la production pourrait totalement partir hors de Chine si la situation ne s’améliorait pas « dans un très proche futur ». Enfin, Nintendo a expliqué que la livraison de sa Switch devrait être retardée au Japon. La console de jeux contient des accessoires comme les manettes Joy-Con fabriquées en Chine pour ses clients japonais. Retard également annoncé pour The Outer Worlds, un jeu vidéo pour Switch assemblé sur place. Enfin, Apple a décidé de reporter la réouverture, initialement prévue le 9 février, au 14 février, pour la majorité de ses 42 magasins chinois.

  • Le salon de Barcelone en berne

Autre effet direct de la propagation de cette maladie, plusieurs entreprises, comme l’industriel chinois ZTE, ont tout simplement annulé leur venue au Mobile World Congress, qui a lieu cette année à Barcelone du 24 au 27 février. Plus de 100 000 participants, dont un tiers de Chinois, se rendent habituellement à ce salon mondial du mobile. Le coréen LG et le suédois Ericsson ont annulé, eux, la conférence qu’ils organisent d’ordinaire sur place. Enfin, alors que de nombreuses rues sont vides en Chine, dans la province de Hubei, où se trouve Wuhan, mais aussi dans celle du Guangdong, plusieurs magasins d’électronique ont décidé de fermer le rideau.

Fait paradoxal, cette crise entraîne un boom du télétravail, ou encore de la consommation de vidéos à la demande, alors qu’un nombre croissant d’habitants sont poussés à rester chez eux. « C’est une nouvelle fois l’affermissement du logiciel (le software) sur le matériel (le hardware) », poursuit Jérôme Habauzit. Autre aspect de ce boom du software, les logiciels d’intelligence artificielle qui, couplés à des drones équipés de haut-parleurs, s’assurent que la population respecte bien le couvre-feu. Un petit air de Black Mirror… D’après Xinmin Evening News, un robot conversationnel est à même d’appeler les habitants qui sont restés chez eux, de vérifier leur identité et de leur prodiguer des conseils sur les centres de traitement à proximité de leur domicile. Capable de reconnaissance vocale, il pourrait donner jusqu’à 200 appels en cinq minutes. Pour l’instant, l’impact économique causé par le coronavirus serait encore mesuré : selon les chiffres d’Oxford Economics, les prévisions de croissance pour la Chine en 2020 sont de 5,6 %, contre 6 % avant la connaissance de la maladie. Mais l’impact sera sans doute beaucoup plus fort, si le coronavirus poursuit sa course folle.

  • La riposte est en marche

En attendant, les géants du secteur n’ont pas encore dit leur dernier mot. Le fabricant Xiaomi, qui a annoncé la commercialisation prochaine d’une lampe à stériliser. De la taille d’une canette de coca, elle a été lancée sur la plateforme de crowdfunding YouPin, où elle a attiré le concours de 64 000 contributeurs, et devrait voir le jour le 20 février. Selon le China Morning Post, l’entreprise Shanghai Lingzhi Technology a mis au point un robot capable de désinfecter les routes qui mènent à l’hôpital avec une autonomie de trois heures. Enfin, Foxconn s’est lancée dans une tout autre activité, la fabrication de « masques » de protection. L’entreprise aimerait en produire quelque deux millions d’unités par mois. « Dans cette guerre contre l’épidémie, chaque seconde compte », a déclaré l’entreprise sur le réseau social WeChat, avant d’expliquer « le plus tôt nous prendrons les mesures de précaution, le plus tôt nous arriverons à nous protéger du virus, le plus tôt nous arriverons à sauver des vies, et donc le plus tôt nous arriverons à surmonter tout cela ». Bref, un changement radical de stratégie, mais essentiel pour affronter ce qui apparaît comme la plus grande crise de son histoire.

lepoint.fr

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