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Le double jeu de l’industrie pharmaceutique

Les géants de la pharmacie mettent les bouchées doubles pour trouver la parade au coronavirus. Un vaste essai a été lancé dimanche en Europe pour tester plusieurs médicaments existants. Cette mobilisation générale représente aussi une aubaine pour cette industrie.

Les Big pharma, comme on les appelle aux États-Unis, font effectivement partie de LA solution à la pandémie, grâce notamment aux recherches qu’elles ont lancé tous azimuts pour fabriquer un vaccin. Un objectif qui prendra du temps, au moins une année, voire beaucoup plus. Mais surtout grâce aux principes actifs qu’elles ont déjà dans leur catalogue et qui sont peut-être des armes à efficacité immédiate contre le coronavirus. Le Français Sanofi s’apprêtait à abandonner le Kevzara, un médicament employé contre la polyarthrite rhumatoïde, parce qu’il n’était pas assez rentable face aux concurrents. Mais depuis qu’il a été classé parmi les molécules prometteuses face au Covid-19, le partenariat avec la biotech américaine Regeneron a été relancé.

Sur ce marché hyper concurrentiel tous les coups sont permis. Parfois avec le concours des États. Donald Trump a voulu ainsi mettre la main sur la biotech allemande Curevac qui travaille actuellement sur un vaccin anti coronavirus. Pour convaincre de leur solidarité et de leur engagement, les géants de la pharmacie ont tenu une conférence de presse il y a quelque jours. « On ne se reposera pas tant qu’on n’aura pas trouvé la solution », a promis le directeur général de la Fédération internationale des industries pharmaceutiques Thomas Cuenila.

Une conférence de presse pour expliquer un problème d’offre

Une fois les bonnes molécules identifiées, il faudra en produire en masse, or la demande sera dans un premier temps supérieure à l’offre. Pour gérér la pénurie qui se profile, les laboratoires ont des stratégies parfois opposées : face à la hausse exponentielle de la demande de Remdésivir, une des molécules actuellement testées, l’américain Gilead a suspendu sa distribution, le temps que son efficacité soit prouvée. En revanche un autre labo américain Abbvie vient lui de renoncer à sa licence sur le Kaletra, ce médicament utilisé couramment pour soigner le VIH est aussi à l’essai. Cela veut dire que les fabricants du monde entier peuvent maintenant produire des génériques du Kaletra. Une générosité exceptionnelle sur ce marché où les géants se livrent une guerre sans merci pour défendre leur poule aux œufs d’or, la licence, qui permet d’avoir l’exclusivité de la production.

Le recours à la chloroquine, un antipaludéen, vient d’être autorisé en France, la production est-elle suffisante ?

Ce médicament encore controversé, qui fait partie des molécules testés à grande échelle est maintenant administré à Marseille par l’infectiologue Didier Raoult, l’un de ses avocats de la première heure. Il s’arrache dans les autres pays. Au Maroc, le gouvernement a réquisitionné tous les stocks existants. En France, d’après Sanofi, le détenteur du principe actif, le stock actuel permettrait de traiter 350 000 malades. Sanofi dit pouvoir offrir des millions de doses.

Et puis la France vient de redécouvrir qu’elle avait encore sur son territoire une usine capable d’en produire à grande échelle. L’usine Farma, près de Lyon, aujourd’hui en redressement judiciaire. Contacté hier après-midi, son directeur dit n’avoir pas reçu de commandes pour le moment.

Le prix du médicament pourrait être un obstacle à sa diffusion

Aux États-Unis, c’est un vrai sujet. Un laboratoire du New Jersey a fait scandale en augmentant le prix de l’anti paludéen, la chloroquine, de 100% dès janvier. Officiellement pour financer le développement de nouvelles capacités industrielles afin d’anticiper la hausse mondiale de la demande. La firme a très vite rétabli le prix initial après le tollé suscité par cette hausse opportuniste. Le secrétaire à la Santé reconnait que les prix peuvent augmenter mais il n’est pas prêt à agir pour limiter ces abus. Une attitude qui scandalise les démocrates. C’est avec des fonds publics que les laboratoires ont pu mettre au point les médicaments, c’est vrai pour le Remdesivir qui a été mis au point au moment de la lutte contre Ebola.

EN BREF

L’Equateur frise le défaut de paiement : l’État se dit incapable d’honorer le versement des intérêts dus cette semaine sur une partie de sa dette.Avec le Brésil c’est le pays d’Amérique du sud le plus touché par la pandémie. L’augmentation des dépenses de santé plus la baisse du baril du pétrole l’ont déjà contraint à prendre des mesures d’austérité budgétaire. Le gouvernement veut maintenant renégocier sa dette avec ses créanciers.

Ce mardi, les marchés asiatiques repartent à la hausse, revigorés par la Fed. La Bourse de Tokyo a terminé sur une hausse de 7%. Le baril de pétrole a regagné 5%. Les marchés sont rassurés par le soutien illimité  promis hier par la réserve fédérale, la banque centrale des États-Unis.

RFI

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